A strange vision, reported (and photographed) by Coralie Chappat:
Il est tôt le matin, tandis que je m'engouffre dans la station de métro
Franklin Roosevelt. Soudainement à ma gauche, je me sens comme
aspirée, mon attention requise par un mouvement intense d'énergie.
Un
massif trou noir marque son envergure, dans un déplacement effleurant à
peine le sol. Il semble bondir plutôt que monter les escaliers. Son
passage indiffère, ne suscitant aucune réaction. A la manière de
l'esprit, il traverse la réalité sans s'attarder.
D'un geste naturel,
je tire de ma poche, mon appareil photo pour saisir la trace dans mon
objectif de ce que je ressens sans voir. Je m'accroche à son sillage
mais il s'évanouit au bout du couloir. C'est fini. Il a disparu. Je
monte dans un wagon de ma rame et tandis que je vérifie sa présence fugace dans mes images numériques,
mon regard se tourne mécaniquement vers le quai d'en face.
La station de métro Franklin Roosevelt dans un silence apocalyptique,
dépouillée de sa chair, semblable à l'Écorché de Houdon, s'est vidée de
sa masse humaine, privée de temporalité.
Le père a ressurgit, comme une anomalie dans la modélisation de
l'espace temps, signant de son sceau, le versant existentiel du lieu.
Je l'observe sans retenue. Il couvre sa tête, ouvre son bréviaire,
s'enveloppe dans sa prière. Deux ultimes clichés clôturent notre
rencontre.
Le poids de sa spatialité se fond en moi.